CONSTITUTION : LES GAGNANTS ET LES PERDANTS
Qui va vraiment bénéficier de la réforme ? Le gouvernement ? Le Parlement ? Le chef de l'Etat ? Ou les citoyens ? Petit inventaire des principales dispositions.
Il ne peut désormais accomplir plus de deux mandats consécutifs.
Il exerce son droit de grâce à titre individuel et non plus de façon collective, comme cela arrivait parfois au moment de son élection ou le 14 juillet.
Il ne préside plus le Conseil supérieur de la Magistrature.
Les «pouvoirs exceptionnels» que lui confère l'article 16 de la Constitution, en cas de crise majeure, sont encadrés. Au bout d'une période de trente jours, les présidents des deux Assemblées, 60 députés ou 60 sénateurs peuvent saisir le Conseil constitutionnel afin qu'il examine si les conditions sont bien réunies pour que l'article 16 s'applique. Au bout de soixante jours, le Conseil constitutionnel procède à cet examen de plein droit.
Son pouvoir de nomination est soumis à l'avis des commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat. Ces dernières disposent d'un droit de veto si trois cinquièmes de leurs membres se prononcent en ce sens. Cette disposition concerne notamment les nominations présidentielles au Conseil constitutionnel, au Conseil supérieur de la Magistrature ou encore celle du nouveau «défenseur des droits des citoyens». Mais pas celles des ambassadeurs, des préfets, des hauts fonctionnaires ou des militaires.
II peut désormais s'adresser de vive voix aux parlementaires alors que la Constitution ne lui permettait jusqu'à présent que de leur faire lire un message. La déclaration du président de la République pourra donner lieu à un débat, mais hors sa présence, et à condition que celui-ci ne soit pas suivi d'un vote.
Le gouvernement
Le Premier ministre n'a plus le monopole des interventions devant le Parlement.
Il est tenu d'informer le Parlement de sa décision de faire intervenir les forces armées à l'étranger au plus tard trois jours après le début de l'intervention. Si celle-ci excède quatre mois, le gouvernement soumet sa prolongation à l'autorisation du Parlement.
Le gouvernement n'a plus le contrôle de l'agenda parlementaire, qu'il partage désormais avec chaque Assemblée.
L'utilisation de l'article 49-3 est encadrée. Cette disposition qui permettait au Premier ministre de faire passer un texte sans vote, à condition d'engager la responsabilité du gouvernement, est restreinte à la loi de finances, au budget de la Sécurité sociale et à un seul texte de son choix par session parlementaire.
Le ministre de la Justice ne siège plus au Conseil supérieur de la Magistrature.
Les parlementaires qui deviennent ministres ou secrétaires d'Etat retrouvent leur siège automatiquement après leur départ du gouvernement.
Le Parlement
II lui revient non seulement de voter la loi, mais aussi de contrôler l'action du gouvernement et d'évaluer les politiques publiques.
Deux semaines par mois, l'Assemblée nationale et le Sénat auront la maîtrise de leur ordre du jour, contre une fois par mois auparavant.
Un jour de séance par mois est réservé à un ordre du jour fixé par l'opposition parlementaire, qui se verra par ailleurs reconnaître des droits spécifiques précisés par les règlements de chaque Assemblée.
Les discussions en séance porteront désormais sur les textes adoptés par les commissions compétentes de l'Assemblée nationale ou du Sénat et non plus sur ceux du gouvernement, à l'exception des lois de finances.
Le droit d'amendement des parlementaires est soumis à des conditions fixées par les règlements des deux Assemblées.
La procédure d'examen d'un texte en urgence est soumise à l'accord de la conférence des présidents de chaque Assemblée.
Les députés et sénateurs disposent d'un droit de référendum à condition que cette initiative soit soutenue par un cinquième des membres du Parlement (soit 185 parlementaires) et un dixième des inscrits sur les listes électorales (soit quelque 4,4 millions de personnes). L'objet de ce référendum, qui doit être validé par le Conseil constitutionnel, ne peut porter sur l'abrogation d'une loi promulguée depuis moins d'un an.
Le Parlement autorise le gouvernement à poursuivre une intervention militaire à l'étranger lorsque celle-ci dépasse quatre mois.
Désormais le nombre de députés est limité par la Constitution à 577, celui des sénateurs à 348.
Tout redécoupage de la carte électorale sera soumis à l'avis d'une commission indépendante.
Le citoyen
Lors d'un litige, tout justiciable pourra désormais faire saisir le Conseil constitutionnel s'il considère que la loi qu'on lui oppose porte atteinte aux droits et aux libertés.
Tout justiciable pourra saisir le Conseil supérieur de la Magistrature dans des conditions qu'il reste à définir.
Un «défenseur des droits des citoyens» est instauré. Nommé pour six ans par le président de la République, il regroupera les fonctions de l'actuel médiateur de la République, de la Commission nationale de Déontologie de la Sécurité et du contrôleur général des lieux de privation de liberté.
Extrait du Nouvel Observateur du 24 juillet 2008 - Auteur : Matthieu Croissandeau